rédaction et traduction analyse d’oeuvres

La décoration comme absolu ?

Nature morte aux Géraniums,
Henri Matisse, 1910
&
Judith II (Salomé),
Gustav Klimt, 1909

Une analyse comparative d’oeuvres consiste à comparer les différences et les similitudes que l’on peut trouver dans deux oeuvres ou plus. Le but est de mettre en évidences les points communs entre deux artistes, tant dans leur propos que dans leur «touches». Ici, l’analyse compare Judith II (Salomé) de Gustav Klimt et Nature morte aux Géraniums de Henri Matisse et met en évidence l’utilisation du motif et de l’ornementation chez ses deux peintres aux coups de pinceau pourtant si différents. Elle faisait partie d’un livret complet, un embryon de recherche sur l’ornementation chez Matisse et Klimt.

Extrait :

La question de l’ornement et sa présence dans l’oeuvre est une problématique qui traverse toute la peinture de Matisse et Klimt.

Extrêmement présente chez ces deux artistes de la fin du XIXème-début du XXème siècle, elle se manifeste de manière différente.

Néanmoins, si l’on se concentre sur leur travail, il est alors possible de trouver des similitudes dans des peintures pourtant radicalement différentes.

En quoi les oeuvres de Matisse et Klimt font-elles de la peinture même une ornementation ?

Attachons-nous pour répondre à cette question à Nature morte aux Géraniums (1910) de Henri Matisse et à Judith II (Salomé) (1909) de Gustav Klimt. Nature morte aux géraniums est une toile de format moyen en orientation paysage représentant une table sur laquelle a été posée un grand drap bleu et un pot de géranium.

Le tout se situe probablement dans l’atelier de l’artiste, c’est en tout cas ce que le tableau accroché au mur et celui posé au sol sur la gauche nous pousse à supposer.

Jean-Jacques Breton dira même à ce propos :

 

« Les murs d’atelier ou de cabinets de travail sont des endroits idéals pour créer les conditions d’une mise en abyme, tableau dans lequel apparaît le tableau ou d’autres tableaux. »

 

Judith II (Salomé) est une huile sur toile de grand format en orientation portrait.

Représentant une femme courbée en avant et retenant par les cheveux une tête tranchée, il fait allusion au mythe de Salomé, fille de roi qui ayant réussi à séduire son père (ou son beau-père suivant les versions), demande à ce qu’on lui apporte la tête tranchée de Saint Jean-Baptiste.

 

[…]

 

Bien que les sujets de ces deux tableaux soient totalement différents, on remarque la présence systématique de motifs ondulatoires, des arabesques.

Là où chez Matisse, les géraniums semblent être un prétexte à ces arabesques ; chez Klimt, elles semblent davantage lier le sujet et la nature par le végétal qui envahit le corps.

Chez lui, c’est le mythe qui est prétexte à peindre une femme dénudée, sans doute de petite vertu.

Enfin, nous pourrons dire que, si chez Klimt, les arabesques sont inspirée des spirales mycéniennes, chez Matisse, elles se rapportent davantage aux motifs de décoration européens, inspiré du végétal.

Pour conclure, on pourra alors noter que le format taille humaine de Judith II (Salomé) permet au spectateur de plonger dans la nature et se laisser lui aussi envahir par le végétal. Pourtant, le cade large et atypique vient créer une distance et donc replacer le tableau dans son statut de décor.

Quant à la Nature Morte aux Géraniums, son format moyen et son format paysage lui permettent de s’inscrire facilement dans un milieu hétérogène (un salon par exemple) et donc de devenir décoration.

De fait, si les ornements sont un point commun à ces deux oeuvres, c’est bel et bien par le traitement général de la toile que leur peintres en font de véritables ornementations.

Les arabesques ne sont alors qu’une mise en abyme dans des ornementations plus importantes et participent de fait à l’assimilation des peintures comme décoration et non en tant qu’objet d’ art à part entière.

Vous en voulez plus ?

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